Cette thèse propose une lecture de textes canoniques du réalisme germanophone selon le prisme des inquiétudes que provoquent les éléments placés à la marge : le féminin, le fantastique et l’ornement. La base commune qui permet de relier ces catégories esthétiques, anthropologiques et sociales est qu’elles se définissent en tant qu’Autre dans une bipolarité : homme – femme, réel – fantastique, ›grand‹ art – ornement. La hiérarchie qui sous-tend ces oppositions s’avère néanmoins peu stable, de telle sorte que ces éléments marginalisés troublent le centre normatif. Le fantastique est abordé comme élément constitutif pour la mise en forme littéraire de problèmes sociaux actuels et ›réels‹, et les rapports entre les sexes tels que définis par la société bourgeoise, sont montrés comme mis en mouvement et ambivalents. L’analyse détaillée des textes de Theodor Fontane, Gottfried Keller et Theodor Storm se concentre d’abord sur la femme comme ›principe esthétique‹ et comme ›genre‹, capté et fixé dans l’image, et montre que ce féminin imagé et idéalisé se convertit au contraire en déclencheur d’une imagination débridée et déréglée, qui s’inspire de sources littéraires et mythologiques (Pénélope, Cendrillon, sorcières etc.). Elle s’attache ensuite aux modèles, aux rôles et aux normes liés au mariage bourgeois et aux enjeux qu’ils constituent pour l’acceptation ou le rejet de la femme comme égale. La troisième partie étudie enfin les rapports entre l’idéal familial bourgeois et la société patriarcale. Dans les romans le mariage bourgeois est hanté par les fantômes de rôles sexuels encore en vigueur, mais désormais obsolètes, ce qui confère aux foyers une inquiétante étrangeté au sens Freudien. ; This dissertation offers an analysis of canonical texts from German literary realism using the anxiety that is felt by readers and writers in what constitutes the margins of realist literature in the 19th century: the feminine, the fantastic and ornamentations.These aesthetic, anthropologic and social categories are linked as they are all defined by a binary opposition that turns them into the Other or the Inessential: male-female, reality-fantastic, art-ornamentation. The hierarchy upon which these oppositions are built is however not that stable as these elements at the margin do trouble and replace what constitutes the society’s normative core. The fantastic elements in the works of the authors are used as constituting materials to engage the literary discussion on present and real social problems at the time of writing. The relationships between the sexes and genders which were so clearly described in the bourgeois era are seen as ambivalent and in motion.The three parts of this dissertation provide an in-depth analysis of the works of Theodor Fontane, Gottfried Keller and Theodor Storm. The first section of the work will focus on the figure of the woman as an aesthetic which is both captured and fixed in the image. It will show that this idealised and pictured feminine becomes the catalyst for unbridled and unruly imagination. Then, the traditional roles and behaviours within patriarchal marriage will then be shown to be largely inspired by literary tradition, and in particular in the myths and the fairy-tale (Penelope, Cinderella, the Witch, etc.). Lastly, the relationships between the ideal bourgeois family and the patriarchal family will be analysed in the work of Fontane and Storm. As the era of German realist literature ended, patriarchal marriage was haunted by the ghosts of gender roles, which however obsolete, were still predominant. This paradox made families unheimlich in the Freudian sense.
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