Le traducteur allemand Elmar Tophoven (1923-1989) a constitué au cours de sa carrière de riches archives documentant son travail sur des écrivains tels que Samuel Beckett, Alain Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute et Claude Simon. Il a en effet élaboré une méthode appelée « traduction transparente », qui consiste à prendre en notes son processus de traduction, d’abord sur des fiches, puis à l’ordinateur. Loin d’être effacé et invisible, le traducteur donne ainsi à voir son travail d’écriture et de création et se manifeste comme l’auteur du texte traduit. Cette auctorialité s’ancre tout d’abord dans les discours qui construisent la figure du traducteur, depuis sa biographie jusqu’à sa posture. Elle doit être aussi considérée comme le fruit d’une trajectoire sociale, qui se situe dans un champ de la traduction en voie d’autonomisation. Elle est enfin révélée par l’analyse génétique des manuscrits que la pratique de la traduction transparente a permis de créer et de conserver. Grâce à cette méthode visant à améliorer la condition des traductrices et traducteurs littéraires, Elmar Tophoven peut non seulement être considéré comme l’auteur d’une véritable œuvre traductive, mais aussi comme un acteur important ayant contribué à faire reconnaître la dimension auctoriale de toute traduction. ; Over the course of his career, German translator Elmar Tophoven (1923-1989) built a rich archive documenting his work on writers such as Samuel Beckett, Alain Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute and Claude Simon. He developed a method called “transparent translation”, which consists in recording his translation process on index cards, and eventually on a computer. Far from being erased and invisible, the translator thus evidently shows how he writes and creates, presenting himself as the author of the translated text. This authorship is first based on the discourses which shape the figure of the translator, from his biography to his posture. It must also be viewed as the result of his social trajectory, taking place in the translation field which is in the process of gaining autonomy. Finally, the genetic analysis of the manuscripts created and preserved by the practice of transparent translation reveals the authorship of the translator. On the basis of this method aiming at improving the conditions of literary translators, Elmar Tophoven can be seen both as the author of a true translation oeuvre, and as an important contributor to the recognition of the authorial dimension of every translation.
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